En France, Mario Luraschi est un personnage incontournable dans le monde du cinéma. Dès qu’un cheval doit apparaître sur un grand écran, le réalisateur fait appel à lui : 553 films à ce jour ! La plupart des grands acteurs français, Jean Reno, Sophie Marceau, Christian Clavier etc. sont passés chez lui pour apprendre à monter à cheval pour les besoins d’un film. Certains sont restés cavaliers grâce à lui. Mais ce fils d’émigré italien, qui est parti de rien, est plus qu’un cascadeur de cinéma : c’est un véritable homme de cheval respecté par le milieu équestre en France et à l’étranger. Ce que l’on sait moins, c’est que Mario a longtemps séjourné en Argentine où il a été joueur de… pato avec un handicap de 7 !
On dit que c’est grâce à vous que les chevaux ont arrêté de mourir dans les cascades de cinéma : cette histoire est-elle vrai ?
J’ai effectivement apporté beaucoup de protection du cheval dans le cinéma. Parce que j’aime le cheval et il est stupide de faire souffrir un animal pour faire un film. Un millimètre de la peau de mon cheval ne vaut pas un mètre de pellicule. Mais je ne peux pas jeter la pierre à ceux qui faisaient cela au début, comme tendre des câbles pour faire tomber un cheval, car la mentalité des hommes des années 30 n’était pas la même que celle des année 70. Avec Allain Bougrain-Dubourg, qui est un défenseur médiatique des animaux, nous avons réussi à faire voter une loi qui empêchait de diffuser une image de cinéma où un animal aurait souffert. Loi qui a été adoptée par les Américains.
Aujourd’hui, dès qu’un cheval apparaît dans un film, on fait appel à vous et à personne d’autre : comment avez-vous réussi ce coup ?
Au cinéma, c’est très facile de faire un premier film, mais il peut être rapidement le dernier. Je parvenais à réussir l’action exactement comme on me le demandait. Le but du producteur étant qu’il veut obtenir son image à moindres frais, le metteur en scène veut donc que ça marche au plus vite. Et comme ça marchait à peu près à tous les coups avec moi, on me rappelait à chaque fois.
Combien d’acteurs avez-vous mis à cheval ? Quels ont été les plus célèbres ?
J’ai dû mettre à peu près 90% des acteurs français en selle. Les plus célèbres sont Sophie Marceau, Jean Reno, Christian Clavier, Jean Dujardin, Alex Lutz... Mais également Matt Damon, Heath Ledger, Milla Jovovich pour Jeanne d’Arc, Salma Hayek, Penelope Cruz…
Combien de chevaux avez-vous dressé dans votre vie ?
En fait, mes chevaux sont tous dressés en premier lieu à la haute-école avant d’effectuer des cascades ou autre chose. C’est indispensable, notamment pour obtenir paradoxalement les choses les plus simples. J’ai dû en dresser à peu près trois-cents. Ils font tous aussi de l’attelage, je crois que c’est la discipline que je préfère.
Parlez-nous de cette expérience en Argentine où vous vous êtes retrouvé handicap 7 de pato : un volet inattendu et méconnu de votre riche vie d’homme de cheval ?
Cela doit remonter à… 1978, avant que le horse-ball n’existe. Nous avions monté une équipe de France de pato avec les gens de mon club. Nous avions préparé un terrain à côté de chez moi pour s’entrainer et avions fait une présentation au deuxième Salon du Cheval à Vincennes. Nous avons alors été invités à Palermo pour un Argentine-France. Les Argentins nous avaient prêté un bon handicap qui devait s’appeler Liborio (Liborio Cosentino, une légende de ce sport en Argentine, ndlr) grâce à qui nous n’avions perdu que 15 à 12. A la suite de ce match, la fédération argentine m’a attribué un 7 de handicap, effectivement. Mais cela fut un grand moment de fierté de représenter la France dans la Mecque du polo. En rentrant, j’ai parlé de ce sport aux frères Depons, à Bordeaux, qui ont intelligemment développé le horse-ball, qui a été créé en 1979 en France. Quelques années plus tard, les Argentins sont revenus en France pour un match de horse-ball en infligeant une lourde défaite aux Français et s’ils n’avaient pas été indulgents en fin de match, laissant leurs adversaires marquer, cela aurait pu se terminer par un 20 à 0 en leur faveur.
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