... selon Alejandro Muzzio et Robert Strom
Avec Alejandro Muzzio, c’est un finaliste du dernier Open d’Argentine, sous les couleurs de La Dolfina, qui vient à Chantilly (Clinova). Robert Strom, lui, mènera à nouveau son équipe de Ste-Mesme pour tenter de décrocher un troisième titre. Vainqueur à Chantilly, mais également à Paris et surtout à Sotogrande (Copa de Oro), il a également joué la Copa Cámara. Son père avait créé un élevage de chevaux de polo qu’il poursuit à Ste-Mesme. Qui mieux que ces deux joueurs, aux profils différents, peut être davantage qualifié pour tenter de définir ce qu’est un cheval de polo parfait ?
C’est quoi le cheval de polo parfait pour vous ? Sexe, taille et qualités ?
Alejandro Muzzio : Le cheval parfait est celui qui vous donne tout ce que l’on attend de lui, peu importe le sexe ni sa taille.
Robert Strom : Pour moi, et comme beaucoup de joueurs aujourd’hui, les juments sont en général meilleures que les mâles, surtout les hongres qui sont souvent plus peureux. Les juments ont plus de cœur. Historiquement, tous mes meilleurs chevaux ont été des juments. La taille n’est pas un sujet pour moi. J’ai monté de très petites juments qui ont été incroyables, ainsi qu’un entier très grand. La première qualité que je recherche est l’explosivité, les premiers mètres sont les plus importants, plus que la vitesse pour le polo que l’on joue en Europe.
Un grand cheval, est-ce un handicap ? Quelle est la taille maximale selon vous ?
AM : La taille n’est pas un problème tant que le cavalier s’en arrange. Pour ma part, je préfère des chevaux plutôt petits qui me permettent d’avoir un meilleur contrôle de la balle.
RS : Pour moi, pas du tout. J’ai un étalon qui s’appelle Sin, acheté à Fred Mannix il y a quelques années et que je joue avec un maillet de 54 pouces. Sur le papier, le cheval ne paraît pas extraordinaire, mais il m’a donné des chukkers incroyables et m’a fait gagner beaucoup de matchs. Au marquage, personne ne peut me bouger et c’est agréable d’être ainsi sur un grand cheval et de savoir qu’au contact, on va gagner des actions. Mais bon, « 54 », c’est la taille maximum.
Quand vous achetez un cheval, regardez-vous le pedigree ?
AM : Je me fiche du pedigree quand je recrute un cheval. Ce que je considère avant tout, c’est son tempérament, son caractère, son état général et surtout sa résistance, son endurance.
RS : Bien sûr, surtout quand j’achète en Argentine, car il s’agit de ramener une bonne génétique en France pour notre élevage de Ste-Mesme et créer de nouvelles lignées avec notre étalon maison qui vient de l’élevage Tanoira.
Le modèle, la beauté du cheval, c’est important pour vous ?
AM : Pour moi, pratiquement tous les chevaux sont beaux. Cependant, j’aime rechercher de beaux modèles et une bonne conformation ce qui est un gage de sécurité quant à son équilibre.
RS : Évidemment, on préfère avoir une bonne jument qui soit en plus très jolie. Une jument « 52 » bien bâtie, large avec une jolie tête est toujours le genre de modèle que l’on recherche, la licorne que tout le monde cherche.
Un pur-sang peut-il être un cheval parfait ?
AM : Bien sûr que le pur-sang peut être un cheval parfait avec cet inconvénient que ce sont des réformés des courses et qu’ils ont donc un passé que l’on ne peut pas connaître.
RS : Cela a été largement prouvé : beaucoup de pur-sang de réforme sont devenus de très, très bons chevaux de polo. C’est important dans l’élevage du cheval de polo de faire des apports de sang pur, cela amène de la vitesse et de l’explosion. Mon père avait commencé notre élevage avec des pur-sang et aujourd’hui, nous avons des filles et petites-filles issues de ces croisements qui sont de très bons chevaux.
Qui a été le cheval parfait, pour l’instant, au cours de votre carrière ?
AM : J’ai eu la chance de monter énormément de bons chevaux comme ceux que l’on a pu voir avec moi à Palermo, mais je peux vous en citer un en particulier et qui était toujours de mon côté. Je ne dirais pas que c’était la jument parfaite, mais avec elle, il suffisait de penser à ce que vous vouliez faire et elle faisait tout pour y parvenir. Je l’ai jouée en Grande-Bretagne et en Espagne, mais je n’ai jamais pu l’emmener en Argentine. Elle s’appelait Negrita, elle a remporté deux couvertures du meilleur cheval du tournoi et j’aurais vraiment aimé la voir évoluer avec un bon joueur…
Quoi, vous ne vous considérez pas comme un bon joueur ?
AM : Rires…
RS : Je pense que vous connaissez la réponse : Black, une jument née et éduquée à la maison, petite, maillet 52, noire et incroyable, bâtie comme un tank. La jument parfaite, je n’ai jamais monté un autre cheval comme elle de ma vie. Malheureusement, elle ne joue plus aujourd’hui, arrêtée sur blessure et peut-être que je vais finir par la cloner ! En attendant, elle est poulinière et nous a déjà donné quelques très bons poulains pleins de promesses. Elle a 17 ans, je l’ai jouée de 2010 à 2016, j’ai gagné beaucoup de matchs avec elle à Paris et à Sotogrande où nous avons remporté ensemble la Coupe d’Or. Elle s’est fait une belle réputation et a gagné un certain nombre de couvertures.
Quel cheval parfait amènerez-vous avec vous à Chantilly ?
AM : Pour l’Open de France, j’aurais dans mon piquet un hongre nommé Lager. Quand je joue ce cheval, je peux faire tout ce que je veux.
RS : Actuellement, c’est La Dolfina Maggy, de l’élevage de Cambiaso, qui a du sang de Lufthansa, petite jument alezane « 52 » de 12 ans qui vient d’Argentine, extrêmement réactive, parfois un peu trop, un peu piquante, un peu folle, mais que c’est agréable d’être le premier sur l’action dès que cela change de sens. Elle a un cœur énorme et donnera tout ce qu’elle a, capable de joueur dix minutes sur un match.
Et quel a été le cheval parfait dans l’histoire du polo ?
AM : C’est difficile de n’en retenir qu’un seul ! Tout ce que je peux vous dire, c’est que de temps en temps, on voit passer un cheval et un cavalier qui donnent l’impression de n’être qu’une seule et même personne.
RS : Comme beaucoup, je suppose, je dirais La Dolfina Cuartetera. Elle a prouvé mille fois qu’elle a été la meilleure jument de tous les temps et ses clones le confirment. Cela pousse les limites du réel, mais ses clones sont encore plus incroyables. Il y a une jument qui m’impressionnait beaucoup, je ne sais pas si on peut parler de meilleure jument de tous les temps, mais j’aurais rêvé la monter, c’est Moscù que jouait Facundo Pieres… Il passait les quatre joueurs de l’équipe adverse juste en baissant légèrement la main et elle avait une vitesse que j’aie rarement vue. (Facundo Pieres le confirme dans une interview : « Moscù est la meilleure jument que j’aie jamais montée de toute ma vie. » NDRL)
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